INTERVIEW MATHIEU MISSOFFE


A l'occasion du concours ComicVerse / Soleil : Le souffle du Wendigo, nous avons eu le plaisir de poser quelques questions à Mathieu Missoffe, scénariste de l'album. L'échange a eu lieu par E-mail, le 23 février 2009.


En premier lieu, vous êtes scénariste de séries TV. Comment avez-vous été amené à travailler pour Soleil ?

Grâce à ma rencontre avec le directeur de collection Nicolas Tackian. Lui-même écrivait déjà pour la télé tout en étant un vétéran de la galaxie « Soleil ». Du coup, quand il m’a proposé de travailler sur la collection Corpus Hermeticum qu’il développait avec Jean Wacquet, j’ai trouvé l’aventure passionnante et j’ai foncé.

Comment s’est passée votre rencontre avec Nicolas Tackian ?

Cela faisait longtemps qu’on essayait de travailler ensemble dans le domaine audiovisuel, notamment autour d’une potentielle adaptation en série de sa BD « Tracker », mais à l’époque je n’étais pas encore scénariste. En fait, je peux dire que c’est grâce à lui que je me suis enfin donné un coup de pied au #@% pour pousser au bout toutes ces histoires que j’avais en tête depuis longtemps.
 


Source : actusf.com


Vous continuez les deux activités en parallèle (Scénariste TV et BD). Quelles sont les différences entre un scénariste TV et un scénariste BD ?


Les contraintes liées aux deux supports n’ont bien sûr rien à voir : on apprécie de ne pas avoir de « budget » en BD, puisque -presque- tout est possible sur une planche, alors que la télévision permet dans une certaine mesure un impact émotionnel plus fort…  Au fond, pour un scénariste, combiner les deux permet d’équilibrer les plaisirs et les frustrations. Sinon en terme d’écriture, le créneau particulier des Corpus (One-shot bouclé « de genre ») se rapproche assez d’une écriture TV ou cinéma --- ce qui n’est pas vrai pour d’autres types de bandes dessinées qui impliquent des techniques de narration bien plus spécifiques au 9ème Art.

Est-ce facile de passer des problèmes d’une mère au foyer de 35 ans qui doit se mettre en quête d’un job, aux problèmes des soldats, qui, dans leurs tranchées, sont confrontés à un monstre surnaturel ?

 Ah ah ah. Si l’on y pense, ma situation (celle d’un scénariste de 33 ans qui passe son temps devant son ordinateur) est aussi éloignée de l’une que des autres…. Il suffit donc d’avoir toujours envie de se projeter dans des situations différentes... Personnellement j’aime ce mélange des genres, même s’il est un peu extrême dans ce cas là.

Avec Les Larmes du Désert, vous avez collaboré avec Serge Fino, un dessinateur français. Est-ce différent de travailler avec un dessinateur anglais comme Charlie Adlard ?

C’est sûr que la nécessité pour moi de tout écrire en deux langues pour Charlie a rendu l’écriture un peu plus lourde sur Wendigo. En dehors de ce problème évident, dans les deux cas, le procédé était le même : j’envoyais des textes et de l’autre côté quelqu’un de très talentueux les transformait en planches extraordinaires ! Finalement, le point commun entre les deux collaborations est l’éloignement géographique, puisque Serge est à Toulon, Charlie en Angleterre et moi à Paris. Même si cela rend les choses malheureusement un peu « virtuelles », la BD s’accommode assez bien de ce travail par Internet et téléphone interposé, et cela permet de travailler avec des gens de tous horizons.
 

Le connaissiez-vous avant cette collaboration ?

Non, je ne connaissais pas le travail de Charlie avant de collaborer avec lui. En fait, The Walking Dead n’a été traduit en France qu’après le début de notre travail.

Aviez-vous un script très directif pour Charlie Adlard, ou avait-il une grande liberté d’interprétation ?

Après quelques tâtonnements, nous sommes tombés d’accord sur un principe de base : je lui envoyais des planches très directives et il se réservait le droit de tout changer… C’était une manière de travailler intéressante pour moi puisque je devais vraiment penser mon découpage et mes plans en détail, et Charlie était toujours là pour rectifier le tir. De toute façon, il faut toujours prendre le temps de comprendre les angles ou plans que le dessinateur aime ou n’aime pas dessiner. Autre détail : Charlie avait envie d’expérimenter à partir de photos d’archives et il m’a fallu creuser pour lui trouver les bonnes prises de vues ou cartes postales d’époque.

Avant de travailler sur le sujet, connaissiez-vous la légende du Wendigo ? Une démarche de documentation a-t-elle été nécessaire ?

Pour être très précis, j’ai rencontré cette légende dans un vieux numéro de « L’Incroyable Hulk » quand j’avais une dizaine d’années. Il faut croire que ça m’a marqué puisque 25 ans plus tard, il m’a fallu faire des pieds et des mains pour récupérer l’info extrêmement rare existant sur le sujet. On ne se rend pas compte mais il faut se « farcir » des centaines de pages de traités ethnologiques sur les indiens Crees pour trouver un simple tatouage tribal … J’ai par ailleurs été très intéressé (je pense que ça se voit dans le livre !) par les liens très particuliers que cette légende entretient avec la psychiatrie.
 


 

Avez-vous lu Walking Dead ? Si oui, qu’en pensez-vous ?

J’adore. J’avoue ne pas être un fan de zombies à la base, mais le fait de sérialiser sur la longueur ce genre archi-codé lui donne un vrai souffle.

Walking Dead est une BD en noir & blanc. Charlie Adlard pense que son style est plus adapté au noir & blanc qu’à la couleur. Que pensez-vous de la prestation de Mambba sur Le Souffle du Wendigo ?

 Il est indéniable que le style de Charlie est fait sur-mesure pour du noir et blanc. Mais au vu du résultat final je trouve que les couleurs très contrastées de Mambba donnent une vraie identité visuelle à l’album. Chaque dominante supporte l’ambiance spécifique de la scène qu’elle illustre, je trouve ça vraiment intéressant.
 

Etes-vous grand lecteur de BD ?

Je suis un boulimique de BD tous formats confondus. J’ai un peu délaissé le franco-belge pendant les années 90 pour me focaliser sur les mangas et les comics mais j’y reviens avec grand plaisir depuis quelques années. Et l’explosion des graphic novels et autres formats de BD dits « alternatifs » a encore étendu le champs des possibles : il n’y a plus une seule histoire qui ne soit pas racontable en BD.

Quels genres de BD appréciez-vous plus particulièrement ?

Comme on peut le voir dans « Wendigo », j’ai un faible pour les ambiances assez noires et poisseuses. Du coup je trouve mon compte dans les collections qui mettent ce genre de chose en avant. Notamment en comics dans tout ce que fait le label Vertigo de DC, mais également ici dans ce que font des auteurs comme Christophe Bec ou Xavier Dorison.
 

Etes-vous amateurs de comics ?

C’est une re-découverte assez récente, après les séries de Marvel que j’avais suivies étant plus jeunes.  Et une vraie révélation : le dynamisme de ce secteur est époustouflant quand on creuse un peu. En revanche, en tant que lecteur j’ai un peu de mal avec le rythme de leurs parutions mensuelles à peu de pages, je préfère attendre les « compilations » de 5-6 volumes. Ed Brubaker (au script de « Criminal » notamment) ou Edouardo Risso (au dessin de « 100 Bullets ») sont définitivement mes auteurs/dessinateurs favoris du moment. Mention spéciale également à la série des « 30 Days of Night » de Niles et Templesmith qui est fabuleuse.
 


Quel est votre premier souvenir de lecteur de BD ?

Je dirais « Le Fantôme Espagnol » dans la série Bob et Bobette de Willy Vandersteen. Il m’arrive encore de le relire.
 


Quelles sont vos BD cultes ?

Je suis assez éclectique : cela va des « Passagers du Vent» à quelques uns des premiers Blueberry. Et environ toute l’œuvre d’Hugo Pratt, bien sûr.
 


Source : Blog de François Boyer


Si l’on réalisait la BD qui retrace votre vie, quelle équipe créative choisiriez-vous ?

J’aimerais bien que Frank Miller s’en occupe, mais j’ai peur que ce soit plutôt un matériau à la Jean Claude Tergal de Tronchet. On peut peut-être envisager une collaboration entre les deux…
 


Avec quel artiste de BD, vivant ou mort, aimeriez-vous avoir une conversation ?

Alan Moore, même si ça me fait un peu peur…
 


Source :
Impact Folios


Sur quelle BD aimeriez-vous travailler ?

Ma prochaine.

Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?

Je rassemble actuellement du matériel sur plusieurs pistes. J'aimerais notamment développer une intrigue autour de l'ésotérisme de Prague au moyen âge.

Si vous étiez un personnage de BD, lequel seriez-vous ?

Il se trouve que j’ai énormément de points communs avec Largo Winch.

Sur quelle série TV, française ou étrangère, aimeriez-vous travailler ?

Mais je travaille déjà sur la série de mes rêves : l’histoire d’une psy un peu barrée qui aide la police dans ses enquêtes. A l’antenne très bientôt…

Si vous pouviez inviter quatre personnes à dîner, célèbres ou non, vivantes ou non, lesquelles seraient-elles ?

Clint Eastwood, Kanye West, Ségolène Royal et le Capitaine Nemo. Pour voir.
 


Source : L'Internaute

Source : People.com


Source : L'Internaute

Quelle musique d’ambiance choisiriez-vous pour ce repas ?

 Du Kanye West, car Kanye Westest très susceptible.

Quel plat principal envisageriez-vous de leur servir ?

Des Lasagnes. Car Clint Eastwood adore les lasagnes.

 

 

Toute l'équipe du ComicVerse remercie chaleureusement Mathieu Missoffe pour avoir répondu si amicalement à ces quelques questions !!

Si vous désirez participer au concours ComicVerse / Soleil afin de gagner un album du Souffle du Wendigo, il suffit de cliquer ici.

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